J’ai grandi à quelques pas des plus hauts terrils d’Europe, ceux de la base 11/19 (Loos-en-Gohelle). Leur altitude est d’environ 186 mètres ; ils sont reliés par un terril tabulaire. Les trois terrils s’étendent sur 90 hectares. On y a recensé 205 espèces végétales, 82 espèces d’oiseaux, 12 espèces de mammifères, 9 espèces de libellules et 53 espèces de papillons, plus quelques reptiles.
Aujourd’hui, l’un des terrils est aménagé pour les ascensions en famille, tandis que l’autre, encore récemment interdit (comme me le rappelaient hier mes parents), est aujourd’hui « réservé aux sportifs confirmés ». Rien qui soit susceptible d’arrêter une aventurière telles que moi.
(En reflet, la silhouette des deux terrils coniques.)
Il m’a fallu un peu plus d’une minute pour escalader une succession de mamelons de plus en plus convexes.
J’ai fini l’ascension en nous aidant de ce câble en acier dont l’extrémité supérieure s’avère hérissée de limaille rouillée. Parvenue au sommet, j’ai rencontré une dame équipée pour l’alpinisme, des chaussures aux bâtons. Le vent soufflait très fort, là-haut. La dame m’a informées que non, il n’y avait pas de chemin moins abrupt pour descendre. Un couple de jeunes gens a surgi d’un autre versant, en tennis assez semblables aux miennes, les mains vides. La dame équipée semblait avoir un peu pitié de nous. Je vais vomir, a dit la jeune fille à son compagnon désarmé. Ils se sont assis.
186 mètres, ce n’est pas grand-chose à gravir, mais en descente, les semelles lisses glissent dans la poussière noire et le sol s’éboule. J’ai procédé à tout petits pas, ce qui m’a pris vingt minutes, abandonnant les jeunes gens à la solitude des cimes.
(Vue du terril aménagé depuis le sommet de l’autre ; on devine le début du chemin par lequel j’ai choisi de descendre.)
Je le saurai désormais : l’expression « sportif confirmé » ne concerne pas forcément la force et l’endurance mais implique parfois équipement et technique.