Il y a deux types de vandalismes : le vandalisme légal (le plus destructeur, celui qui a les moyens techniques et financiers d’une destruction massive, la bénédiction des puissants et un costume vert tout neuf) et un vandalisme de petites frappes, qui effraie davantage parce qu’il n’a ni costume ni les dents de la santé ni discours qui ferait passer sa sauvagerie pour autre chose. Je répugnerais à évoquer une troisième catégorie et à désigner comme du vandalisme ce que l’on appelle aussi écoterrorisme ; de toute façon, il n’y en a pas trace dans le bassin minier, tandis que les deux autres types ont entamé à Fouquières-les-Lens une guerre des gangs, comme je l’ai découvert ce matin. Dès que j’ai pénétré dans la Quatrième Dimension, où je n’étais pas allée depuis plusieurs mois, je me suis dit Tiens tiens, ça sent la fin de la Quatrième Dimension, ici, ça sent les aménagements qui vont transformer l’un des sites les plus étranges du coin en promenade pour les familles :

De fait, on trouve désormais dans les 60 hectares des trois inextricables terrils de nombreuses tranchées, de nombreux tas et rochers anti-passage, de nombreuses chicanes en bois (le matériau vert par excellence : pour ne pas utiliser d’acier, tuez des arbres) que la mairie ferait bien d’ignifuger au plus vite, me suis-je dit, et en effet l’une des 73 barrières portait des traces de feu. Le plus effrayant est d’imaginer ce qui reliera les chicanes qui pour l’instant sont assez ridicules, isolées au milieu du paysage. Que ces restrictions d’accès soient une fin en soi ou seulement un moyen en vue de rendre le site attractif pour les dimanches après-midi, elles constituent pour les rares usagers actuels du lieu une atteinte terrible puisque ce sont pour la plupart des polytechniciens sur des quads et des motos, qui sèment des détritus et la terreur chez les lapins, les renards, les faisans, arrachent les branches et les délicats pavots cornus en poussant des hurlements (je les ai croisés bien des fois).

Mais ces jeunes gens, il ne faut pas leur chier dans les bottes. Ils ne vont pas se laisser déposséder de leur terrain de jeu, de leur parc au sens nourrisson du terme, sans craquer une allumette. Il aurait fallu commencer par ignifuger les engins même de la destruction paysagère.

Si seulement ces charmants jeunes gens pouvaient mettre leurs talents pyromanes au service de causes plus urgentes et brûler les engins qui abattent des arbres pour bétonner des terre-pleins, des parkings, je leurs offrirais des packs de kro.