Des nourritures

Dans ce moment difficile (mais intéressant) de ma vie, deux autrices ont été très présentes pour moi, non en tant que confidentes de mes péripéties affectives mais à travers des échanges qui mêlent notre expérience de l’écriture (dans ses diverses dimensions) et de considérations plus intimes qui guident en partie nos choix esthétiques, narratifs et nos prises de position.

(Photo prise au Bouscat lors d’une course à pied, entre une rencontre scolaire et un dîner arrosé au Campanile et en excellente compagnie.)

J’ai rencontré la première au Bouscat, près de Bordeaux, il y a trois ans ; nous prenions les repas du soir avec toute une bande d’auteurs et autrices, dans la cafétéria de l’hôtel Campanile. Je n’aurais pas imaginé alors que je sortirais de ces quelques jours de rencontres scolaires grandie d’une si précieuse amitié, nourrie au fil de denses échanges par mails.

(Photo prise dans ma chambre du Campanile, que je n’ai guère vue puisqu’entre les rencontres scolaires, le salon du livre, les courses à pied jusqu’à Bordeaux et les soirées à rallonge à la cafétéria, je n’ai pas écrit une ligne lors de ce séjour.)

J’ai croisé la seconde quelques mois plus tard, dans un salon du livre où je m’étais littéralement traînée, nous avons passé des heures à parler mais, par la suite, nous n’avons pas engagé de correspondance. Il y a un peu plus de deux semaines (qui me paraissent des mois tant elles ont été intenses et rythmées), je lui ai dit que j’allais mal, que j’avais besoin d’une collaboration pour me relever, que j’avais spontanément pensé à elle parce que j’avais regretté de ne jamais poursuivre notre dialogue et elle a dit Ok, on fait quoi ? Aujourd’hui, nous avons 80 pages de texte et ce soir il y en aura quelques-unes de plus encore, que je vais écrire aujourd’hui avec la même pure exaltation qui me porte depuis le début de ce projet.

(Je n’ai retrouvé que cette photo guère engageante du salon en question, curieusement…)

Je me demandais comment on s’y prendrait pour écrire à quatre mains (l’expression a tout son sens aujourd’hui que l’on écrit sur des claviers) mais dans notre cas c’est d’une fluidité confondante. Un ping-pong, vraiment. J’ai envoyé un premier chapitre, le suivant m’attendait dans ma boîte mail le lendemain, je me suis immédiatement plongée dans la suite et ainsi, jour après jour, la narration se tisse, les personnages s’affinent sans que leur ajustement requière davantage que de subtiles modifications. L’écriture proprement dite se double d’un échange de mails tout aussi fourni de réflexions sur l’écriture en général et plus particulièrement sur celle de notre roman, parfois mêlées de considérations plus personnelles ; je me disais ce matin, en poursuivant le fleuve de ce journal de bord, que ce serait un document intéressant (et très drôle) sur les différentes manières d’aborder la création et sur la possibilité de concilier des approches si différentes.

La semaine dernière, nous avons été amusées, l’autrice mystère et moi, quand j’ai reçu une photo de ma chanson de geste en pile sur une table de libraire à côté de son dernier roman ; c’est elle qui a remarqué le titre du livre qui nous séparait, Nœuds de vie. Nous avons échangé plein de points d’exclamation et décidé que cette librairie bordelaise serait une étape obligée de notre future promo.