Avant l’agitation de la rentrée, la réouverture de la chasse et un potentiel nouveau confinement, je saute sur mon vélo dès lors qu’à mon réveil, à 4h45, il ne pleut pas à torrents et que le vent souffle à moins de 70 km/h. Je vais me perdre dans les champs, les bois, les marais, au bord d’un canal ou d’un autre, d’une rivière, d’un étang, je traverse des villes, des villages, des ports de plaisance, des plateformes multimodales, des zones industrielles, je passe à proximité de maisons isolées où des chiens deviennent fous (avant-hier, j’ai vu un berger allemand faire des saltos arrière tant il avait envie de me croquer, c’en était presque flatteur), je parcours des arrière-mondes, je roule à des endroits que je n’avais vus auparavant que depuis des trains, j’avale des kilomètres, 50 par jour en moyenne, à la force des mollets et des cuisses, ma perception de ce que l’on appelle loin change, mon aire de découverte à ce jour est de 449 km², je ne compte pas m’arrêter là. (Je classe ce billet dans la rubrique Surfaces pour fêter le nombre 449.) Je roule sous des autoroutes, des voies ferrées, des grues de déchargement, des éoliennes, des rampes de silos. Je compare des écluses, des confluences, des passerelles. Je vois le soleil se lever, je suis la progression de nuages énormes comme des soucoupes volantes, je pédale plus vite pour quitter leur ombre quand il y pleut, j’enlève mon sweat, j’ajoute une écharpe, j’enfile mon ciré, j’ôte mon ciré, je sue, je sèche, je souffle dans mes doigts blancs de froid, ma peau grésille sur les chemins de halage sans ombre. Le meilleur chausson aux pommes que j’aie trouvé à ce jour quand mon ventre commençait à crier venait d’une toute petite boulangerie d’Hersin-Coupigny qui vend aussi des livres d’occasion. Je ne croise quasiment que des animaux. Je prends des photos, parfois je chante, parfois j’écoute quelques chansons de Jessica Sligter mais la plupart du temps je me contente d’écouter les milliers d’oiseaux, le vent dans les feuillages, le clapotis de l’eau. Je ne cours plus beaucoup.
Petite promenade sur ma route 66 en 23 images.

Oui, il y a des panneaux amusants ; certains ont des petits airs de NPR, comme le panneau ci-dessous, près de l’écluse de Cuinchy.

D’autres encore plus (ça, c’est à Annequin).

D’autres, encore plus que plus, comme ces flèches concentriques en bord de canal – ici à Dourges.

Parfois on trouve encore des vestiges d’une ère où la signalétique avait un certain charme.

Parfois, c’est plutôt un ensemble qui fait sourire, comme sur cette chapelle de Beuvry, à peine plus grande qu’un abri de jardin.

Mais revenons à nos canaux. Parfois on change de rive sur une passerelle, comme ici (toujours à Beuvry),

parfois on passe sous un pont, pourquoi pas celui-ci qui est sis à Douvrin tandis que le chemin de halage est officiellement à Salomé (bizarrerie des cartes…)

Certaines passerelles sont si attirantes qu’on les emprunterait bien pour le plaisir, comme celle-ci, à Auby,

ou comme ce pont à Bauvin (je vous l’ai déjà présenté, c’est un pont pour rien, posé sur une île et ne reliant rien à rien, vous vous rappelez ?

il se situe ici, à la confluence de la Deûle et du canal d’Aire),

tandis que sur d’autres, on frémit un peu, comme sur la passerelle ci-dessous, entre deux eaux : d’un côté de la passerelle , on est à Flers-en-Escrebieux et, de l’autre côté, à Auby ; à droite comme à gauche clapote une dérivation de la Scarpe. C’est surtout impressionnant de voir passer sous ses pieds des péniches qui viennent d’être chargées,

quelques minutes plus tôt, sur la rive est.

Même type de frisson quand on traverse la plateforme multimodale Delta 3 de Dourges : on regarde le Pasadena glisser sous le pont que les usagers de l’A1 connaissent bien

puis on passe sous les containers que lui livre une grue.

Il est moins inquiétant de voir les péniches au repos dans ce port de plaisance, à la sortie de Douai.

Ici, un port de plaisance plus modeste, celui de Beuvry (cette vue n’en est qu’un détail, il n’est pas si modeste…)

Bref, beaucoup de mes virées consistent certes à longer tel ou tel canal, parfois sur des chemins très étroits, comme ici entre Salomé et Hantay,

mais pas seulement : la moitié du temps, je roule sur des chemins de tracteurs, si paumée que je ne saurais déterminer si la photo ci-dessous a été prise à Auchy-les-Mines ou à Vermelles (je sais que c’est dans le coin parce qu’on voit en arrière-plan les terrils de Vermelles et de Grenay).

Et même quand on zigzague entre champs et pâtures (je crois que nous sommes ci-dessous à proximité de Noeux-les-Mines),

il y a souvent de l’eau, comme ici à Noyelles-lès-Vermelles (on devine des vaches derrière ce marais).

Parfois, je me fais des ami.e.s.

Parfois aussi, je fais quelques visites à caractère culturel – non pas dans des musées mais dans des cités minières. Voici de l’art brut que l’on peut admirer à Mazingarbe, dans le jardin de l’artiste (détail – il y en a bien d’autres).
