Une revue de poésie m’invite à écrire un texte sur ce que j’appelle depuis bien longtemps les arrière-mondes : ça ne s’invente pas. Je pense montrer que les espaces interstitiels sont fréquentés, en fait, même si on ne sait pas bien quand ni par qui, sans doute la nuit par le genre d’individus qu’on n’aimerait précisément pas croiser dans le noir dans un espace interstitiel. On devine leurs activités aux traces qu’elles laissent dans le paysage. Les principaux usages des arrière-mondes, on l’a vu et revu, notamment dans cette rubrique, sont le dépôt d’ordures et la fête sauvage.

On y apprend beaucoup de choses, notamment que tous les gens n’achètent pas des sapins en plastique par respect pour la vie (puisque, pour mémoire, un sapin est un être vivant) ni même par souci écologique (je sais que le plastique n’est pas exactement une matière écolo mais j’ai une amie qui utilise le même sapin artificiel depuis plus de trente ans et je pense que les vrais l’en remercient – personnellement, j’ai trouvé la meilleure alternative possible : je ne sacrifie aucun sapin, vrai ou faux, à Jésus).

On peut se demander avec un certain effroi quel genre d’individu s’amuse à immoler un tigre des neiges en peluche ; le positionner de manière à ce qu’il fasse frémir les joggeuses qui se lèvent tôt comme on l’a vu ici, oui, je peux le comprendre, mais comment a-t-on soudain l’idée d’y mettre le feu ? Quel plaisir en tire-t-on ? On le voit, la fréquentation de l’arrière-monde expose à des réalités que l’on ne soupçonne guère quand on ne fait que traverser les lieux fonctionnels aménagés pour le confort citadin.
