Le dernier caneton est mort. Désormais, ce sont six cadavres qui flottent dans le bassin de rétention d’Intermarché, Noyelles-sous-Lens. Je tiens à remercier le personnel du supermarché, la mairie, la LPO et les pompiers pour leur négligence criminelle. Je n’oublierai pas, jamais, ça ne passera pas ; j’écrirai quelque chose et je ferai en sorte que ce soit publié mais rien ne pourra rendre la vie à ces canetons – ni apaiser ma mauvaise conscience : je n’ai pas réussi à sauver des innocents, je n’ai pas su les soustraire à ce piège fabriqué par mon espèce ni à l’indifférence de celle-ci. Oui, bientôt, j’écrirai quelque chose pour ajouter ma modeste voix à toutes celles d’artistes et de philosophes qui réclament une représentation des non-humains dans les décisions de la société. Je rêve souvent d’un tribunal écologique (maintenant que l’espèce se réveille et se rend compte, hébétée, qu’il y a une urgence climatique, peut-être ce rêve n’est-il plus tout à fait utopique) qui condamnerait les petits pères Ubu de municipalités qui, par exemple, sacrifient d’immenses arbres en pleine santé pour construire un escalier ou un parking (puis plantent des avortons vêtus de bâches en plastique pour « les remplacer » – je propose, une fois de plus, une transposition : pourquoi ne pas abattre les gens quand ils occupent le banc sur lequel on souhaite s’asseoir ? des gens, il en naît tous les jours, non ? pourquoi le terme de remplacement s’appliquerait-il davantage à un arbre qu’à un humain ? c’est en plastique, un arbre ?) et s’assurer que le grand banditisme légal qui éventre des forêts pour faire du profit ne puisse plus exister. Il serait temps aussi que la souffrance animale soit pleinement prise en compte et relève de la loi ; que le spécisme soit considéré exactement pour ce qu’il est : un hyper racisme. Et que ceux qui l’assument s’assument hyper fascistes.
Depuis deux jours, je suis inconsolable. On me dit que mon problème, c’est que j’ai trop d’empathie. Ah bon ? Moi, ce que je trouve terrifiant – le mot est faible – c’est l’absence d’empathie que j’observe face à ce genre de chose :

Et ça se passe à un mètre d’un trottoir. Et ça ne choque personne. Visiblement, des gens ont voulu aider (ou s’amuser ?) en lançant du pain et un sac plastique plein de viennoiseries ainsi que, hors cadre (il y a des limites à ce que je suis capable montrer, même pour dénoncer*) une barquette de viande. Quels dégénérés font ce genre de choses ? Pourquoi ? C’est moi qui ai trop d’empathie ou ce monde qui a un grave problème ?
* Je sais que dénoncer sur un pauvre blog n’est pas assez ambitieux ; j’ai contacté l’édition locale d’un quotidien mais n’ai obtenu aucune réponse.