Different Rooms / Cupo

Peu après notre rencontre, j’ai dit à Valentina qu’elle devrait faire une pièce pour le label australien Longform Editions, dont j’ai presque toutes les parutions féminines (il y a une belle parité dans ce catalogue pourtant tenu par deux messieurs) et qui invite des artistes expérimentales (et -aux, donc) à leur offrir un morceau long (d’où le nom du label) si possible hors de leurs sentiers habituels. Peu après, par une coïncidence assez remarquable, le label a proposé à Valentina d’entrer dans son catalogue, et c’est avec une pièce très étonnante dans son parcours qu’elle a répondu à la commande : Different Rooms est l’un des morceaux d’elle que je préfère à ce jour, à égalité avec celui dont je vais parler dans un instant. Il est inventif, tour à tour drôle et inquiétant.

Mon autre album préféré de Valentina sort demain (on le trouve ici et ). Je l’ai entendu pour la première fois le 28 avril 2022 – il allait encore connaître de nombreuses modifications. Il s’agit de Cupo, en duo avec Laila Sakini. Il m’a tout de suite évoqué une forêt dans laquelle on pourrait errer indéfiniment ; une forêt mystérieuse, luxuriante et humide, quand la pluie a cessé mais que les arbres s’ébrouent encore et que les animaux sortent de leurs cachettes. C’est sur ces impressions que j’ai emmené les deux musiciennes dans le bois d’Hampstead Heath pour une séance de photos, cet été. Nous souhaitions des images étranges, comme de rituels secrets. Weird était notre mot d’ordre. Les photos que nous avons choisies, les voici – voici ma première pochette de disque, recto-verso :

Je ne pensais pas que la photo ci-dessus apparaîtrait au dos, je l’avais prise pour la promo. Notre dernière sélection comportait les photos suivantes :

(si j’avais été seule à décider, j’aurais choisi la photo ci-dessus – qui me fait toujours autant rire, des mois plus tard)

Je souhaite une longue et belle vie à cet album intemporel, délicat et envoûtant.

Basta Now # 2

est aujourd’hui en ligne sur Soundcloud, ici.

Cette fois, c’est un mix pour le samedi soir avec au programme

Klein – Claim It!
Propan – Berlin Clubbing
Felicity Mangan – Cyborg Bugs
Kelly Ruth – Dimensional Peristence
Méryll Ampe – 4N4N4S
Sonae – Tropennacht
Terrine (Claire Gapenne) – Banabila Dub
Nwando Ebizie – I Seduce
Mutamassik (Giulia Loli) – Swampum
Teresa Winter – Fourteen Nights

Le premier morceau, Claim it! de Klein (dont j’ai déjà parlé sur ce blog 73 fois, je pense) est l’un des quelques morceaux qui représentent à mes oreilles très subjectives la perfection en musique : chaque seconde est parfaite, la structure est parfaite, de même que les lamentations (ce Why? à la Yoko Ono), le rythme irrésistible et généreux et les textures à tomber par terre ; il ne manque rien et il n’y a rien à jeter : parfait.

(Klein par Sze NG)

Quant à la toute fin de mon mix, le surgissement hystérique et complètement incongru de Teresa Winter, il me fait rire aux éclats, jusqu’à ce qu’il apporte une touche mélancolique très fin de fête et bienvenu à cette débauche d’énergie.

Wire Magazine

Dans le nouveau numéro de Wire (avec Meredith Monk en couverture, comme je le montrais plus tôt cette semaine), ce compte-rendu de la résidence de Valentina au Café Oto. Je remercie de tout cœur l’auteur de ces lignes, qui ne rend pas seulement hommage à la grâce et au génie de mon amoureuse (eh, ce n’est pas moi qui le dis), à la finesse et à l’inventivité de nos ami.e.s mais fait aussi une belle place à ma performance avec Valentina et Dali. Si on m’avait dit qu’un jour mon nom apparaîtrait, en si incroyable compagnie, dans les pages de mon magazine préféré… Voilà qui est très euphorisant.

Rappel

C’est samedi à partir de 19h, à la Cinematek de Bruxelles : Feelings we don’t have words for, une soirée consacrée à Meredith Monk,

alors que (la nouvelle vient de tomber) le nouveau numéro de mon magazine préféré, Wire, lui consacre (enfin) la couverture de son prochain numéro, à l’occasion de la parution d’un coffret de 12 CD sur le label ECM.

générique

en 2022, j’ai beaucoup ri, beaucoup pleuré, j’ai beaucoup dansé ; j’ai perdu quelques ami.e.s, j’en ai gagné quelques autres et une super petite amie ; j’ai rencontré sept sangliers + un sans tête ; le premier, qui en avait sacrément une, a changé ma vie ; j’ai récolté les fruits de tout ce que j’avais semé pour rester debout pendant la terrible année 2021 et j’ai adoré leur saveur ; j’ai écrit quelques centaines de pages, dont certaines à quatre mains, cofondé un groupe de réflexion artistique et un label / maison de micro-édition ; j’ai pris des dizaines de trains, quelques avions, une flopée de métros, bus et taxis, j’ai beaucoup couru et beaucoup pédalé, j’ai vu des paysages variés, certains brûlants, d’autres glacés, certains sauvages, d’autres carrés ; la musique était là comme toujours, à chaque instant, et pour la première fois j’ai pu la partager pleinement avec d’autres qui l’entendaient aussi et parfois l’entendaient à peu près comme moi je l’entends

je suis reconnaissante à la vie pour cette année fabuleuse alors j’ai décidé de ne pas parler de tout ce qui ne va pas dans ce monde complètement taré – pas ici, pas aujourd’hui

Et comme je ne suis pas prescriptrice, je peux bien me permettre sans dommages de lancer mon TOP 53 très subjectif d’albums parus en 2022, qui ne ressemble à aucun des nombreux charts que j’ai parcourus avec agacement (mais ne pouvant m’en empêcher) en cette fin d’année, ce dont je tire une certaine fierté. Malgré tout, la liste n’est pas exhaustive et j’ai aussi pu oublier, au moment de faire ma petite liste, quelques titres que j’ai en fait adorés à leur sortie, je m’en flagellerai quand ça me reviendra. En attendant, quelques pistes d’écoute pour oreilles gourmandes, classées par ordre de parution :

  1. Ann Eysermans – For Trainspotters Only (28 janvier 2022)
  2. Maya Shenfeld – In Free Fall (28 janvier 2022)
  3. Delphine Dora – À l’abri du monde (4 février 2022)
  4. Cate Le Bon – Pompeii (4 février 2022)
  5. Big Thief – Dragon New Warm Mountain I Believe in You (11 février 2022)
  6. Astrid Øster Mortensen -Sk​æ​rg​å​rdslyd (14 février 2022)
  7. Ulla Strauss – Hope Sonata (15 février 2022)
  8. Debit – The Long Count (17 février 2022)
  9. Matchess – Sonescent (25 février 2022)
  10. Marta Forsberg & Kajsa Magnarsson – Kompisitioner (25 février 2022)
  11. Benedicte Maurseth – Hárr (25 février 2022)
  12. Nyokabi Kariuki – Peace Places: Kenyan Memories (25 février 2022)
  13. Laura Cannell – An Antiphony of the Trees (11 mars 2022)
  14. Jenny Hval – Classic Objects (11 mars 2022)
  15. Ana Fosca – Poised at the Edge of Structure (18 mars 2022)
  16. Puce Mary – You Must have Been Dreaming / Stuck (10/11 avril 2022)
  17. Claire Rousay – Everything Perfect Is Alreay Here (22 avril 2022)
  18. Linnéa Talp – Arch of Motion (29 avril 2022)
  19. Avvitagalli – None Corsa (29 avril 2022)
  20. Valentina Magaletti – La Tempesta Colorata (6 mai 2022)
  21. Karen Willems – Grichte 1 (6 mai 2022)
  22. Patricia Wolf – See-Through (13 mai 2022)
  23. Valentina Magaletti – A Queer Anthology Of Drums (27 mai 2022)
  24. Propan – Swagger (27 mai 2022)
  25. Harrga – Femmes d’intérieur (16 juin 2022)
  26. Silvia Tarozzi & Deborah Walker – Canti di guerra, di lavoro e d‘amore (10 juin 2022)
  27. Chra / Méryll Ampe – Sleepwalkers (21 juin 2022)
  28. Felicia Atkinson – Image Language (24 juin 2022)
  29. Naima Bock – Giant Palm (1 juillet 2022)
  30. Kali Malone – Living Torch (7 juillet 2022)
  31. Indigo Sparke – Hysteria (10 juillet 2022)
  32. Nwando Ebizie – The Swan (22 juillet 2022)
  33. Elaine Howley – The Distance Between Heart and Mouth (12 août 2022)
  34. Dania – Voz (19 août 2022)
  35. Dienne – Addio (26 août 2022)
  36. Klein – Cave In The Wind (1 septembre 2022)
  37. Sarah Davachi – Two Sisters (9 septembre 2022)
  38. Tomaga – Extended Play 1 & 2 (22 septembre 2022)
  39. Aleksandra Słyż – A Vibrant Touch (23 septembre 2022)
  40. Dies Lexic – Lexicon Hall (26 septembre 2022)
  41. Aylu – Profonda Rosa (4 octobre 2022)
  42. Sofie Birch & Antonina Nowacka – Languoria (7 octobre 2022)
  43. Ecka Mordecai – Promise & Illusion (7 octobre 2022)
  44. Valentina Magaletti – Rotta (18 octobre 2022)
  45. Clarice Jensen – Esthesis (21 octobre 2022)
  46. Laila Sakini – Paloma (22 octobre 2022)
  47. Anja Lauvdal – From a Story Now Lost (28 octobre 2022)
  48. Better Corners – Modern Dance Gold: Vol. 1 (1 novembre 2022)
  49. Christina Vantzou – N°5 (11 novembre 2022)
  50. Yosa Peit – Phyton (11 novembre 2022)
  51. Sugar Vendil – May We Know Our Own Strength (11 novembre 2022)
  52. Aviva Endean – Moths & Stars (2 décembre 2022)
  53. Felicity Mangan – Train Tracks Recorded And Edited By Felicity Mangan (9 décembre 2022)

à rebours

Hier sur France Musique, L’expérimentale a proposé un très bon mix autour de la voix, avec quatre pièces de compositeurs et huit de compositrices – ratio assez rare pour être mentionné -, en l’occurrence uniquement des artistes dont j’aime énormément le travail, Sarah Davachi, Joan La Barbara, Antonina Nowacka, Astrid Øster Mortensen, Ulla Strauss, Stine Janvin, Félicia Atkinson et, entre Ulla et Stine, notre amie Laila Sakini. Le titre était le crève-cœur par excellence de son dernier album, Paloma, un morceau intitulé That Wave, That Line, dont la beauté profondément mélancolique ne doit pas faire oublier une spécificité : les paroles y sont à l’envers. Valentina disait l’autre jour à propos de cette chanson qu’elle aurait sans doute été un tube de l’hiver si les paroles étaient dans le bon sens mais alors ce ne serait plus Laila et ce ne serait sans doute pas aussi beau parce que ce ne serait pas étrange. Nous avons insisté pour qu’elle la chante au Café Oto, l’autre jour ; elle m’a dit qu’elle avait répété le texte inversé phonétiquement mais que c’était trop casse-gueule, donc nous n’y avons pas eu droit. Voici cette pépite sombre et insolite.

résidence Oto, day 3

Hier, ma journée a commencé par une course à pied / patinage artistique sur les trottoirs et bords de canaux verglacés, je me suis perdue comme j’aime mais tellement que j’ai dû finir par demander mon chemin à trois personnes différentes. Au final, j’ai couru plus de 20 km en short par -1 ressenti -4, je suis pleine de gloire. Les canards de Victoria Park (qui était sur ma route vers Hackney Marshes) ne se la racontent pas autant que moi pour si peu, eux qui volent et barbotent par tous les temps sans même un short.

Mais ce bonhomme de neige, lui, n’a pas résisté, il a mis un petit chapeau.

Ici, un cormoran et des Schtroumpfs de River Lee Navigation.

Le soir, pendant que Valentina, Al et Susumu faisaient leurs balances, Karolina et moi avons travaillé sur le design des futures parutions Permanent Draft et sur le logo. Nous avons profité de la profusion de cassettes en vente au Café Oto pour alimenter notre réflexion et finalement, quand nous avons décidé de ce que nous souhaitions, avec l’approbation de Dali et Yoshino (qui seront de notre première publication), Valentina est venue écouter le fruit de nos réflexions et a totalement approuvé. C’est assez facile de travailler avec cette équipe-là… Merci à Aude pour la photo souvenir ci-dessous.

L’homme ténébreux que voici, qui fume une cigarette devant le Café Oto (désormais plein à craquer, comme en atteste la buée), c’est Nick de Horn Of Plenty <3

Laila Sakini m’a fait un super cadeau de Noël, ce CD maison de ses field recordings aux titres tordants déclinés sur la base de « It sounds like » (liste qui comporte « It sounds like France VS England », « It sounds like Valentina and me » et « It sounds like the door is frozen »).

Ici, un mini extrait du concert de Laila, hier soir, déchirant, comme l’est le plus souvent sa musique – elle me disait que parfois le public pleurait pendant ses concerts et je veux bien le croire.

Je n’ai pas pris de photos ni de vidéos du concert de Holy Tongue, je dansais avec Tea et Dali, debout sur un banc pour voir Valentina… Ce billet manque de photos de mon petit trésor.

résidence Oto, day 2

Je n’aurais jamais imaginé voir un jour mon nom sur le panneau du Café Oto. Il y manque un nom, cependant…

celui de mon amie Dali de Saint Paul, qui est arrivée in extremis avant notre performance (en bus depuis Bristol parce qu’il y avait grève de train) et que j’ai enrôlée : nous avons donc joué en trio et c’était fantastique de lire mes petits poèmes avec ces deux musiciennes incroyables que sont Valentina et Dali. J’ai donc lu devant une musicienne dont j’étais hyper fan il y a quelques années, Mica Levi, et devant le batteur de Radiohead, dont je n’ai jamais écouté la musique mais qui a été absolument adorable. Dans la salle, hier soir, il y avait beaucoup d’ami.e.s, Agathe, Andrea, Arthur, Aude, Cathy, Davide, Dali, Joao, Joe, Karolina, Natalia, Nick, Sarah, Susumu, Tea, Tom, Yoshino et les autres, c’était très émouvant.

(Je ne sais pas qui a pris cette photo, que Valentina a trouvée sur Internet ; c’est la seule dont je dispose aujourd’hui, sur laquelle on nous voit toutes trois.)

Certain.e.s d’entre nous ont déjà repris le train et l’avion, Sarah est rentrée à New York, Joao à Porto. Je sens venir un petit cafard comme on en a, enfant, à la fin de la colonie de vacances – et Aude, qui est auprès de moi, vient de m’en dire autant… Ci-dessous, des petits selfies avec Tea et Dali <3<3<3. Nous avons décidé de profiter au maximum de nos derniers moments ensemble alors j’y retourne.

résidence Oto, day 1

Les concerts d’hier étaient exceptionnels, si beaux que nous sommes quelques-un.e.s à en avoir pleuré. Il était aussi très émouvant de voir tant de nos ami.e.s réuni.e.s dans ce lieu mythique qu’est le Café Oto.

Ci-dessous, une photo des balances. La performance improvisée de Valentina avec Cathy Lucas à l’alto, Miriam Adefris à la harpe et Marta Salogni aux Revox est sans doute le plus magnifique concert auquel j’aie jamais assisté. J’espère que nous en ferons un disque Permanent Draft.

Ici nous sommes avec les ami.e.s Cathy, Sarah et Susumu.

Ici avec Tea, Aude, Sarah et Matthew.

Ici avec Marta, Tea, Marlene, Cathy, Sarah et Susumu. Il manque du monde sur ces photos mais ce sont déjà de très chouettes souvenirs.

Après cette soirée incroyable, il était bon d’éliminer quelques toxines en short. Depuis que j’ai converti Susumu à la course à pied, il court un jour sur deux mais la patinoire de cette semaine l’a découragé. J’ai peur de tomber dans le canal, me dit-il. Je me réjouis qu’une telle infortune ne me soit pas arrivée ce matin : ce soir, je lis au Café Oto, my god. Ci-dessous, des photos de Regent’s Canal et Victoria Park.

Les requins souffrent de la neige.

lobsters

Dimanche tranquille à Londres, hier ; nous avons passé l’après-midi au siège d’un label, où nous avons beaucoup dansé, emballé des choses et bu du thé. La veille, nous avions fêté Noël au siège d’un autre label, avec quelques amis (les Vanishing Twin, Yoshino, Marie, quasi toute la bande) jusqu’à quatre heures du matin.

Je ne sais plus sur quelle chanson Sarah dansait quand j’ai pris la photo ci-dessous

mais ici, je suis sûre que Valentina dansait sur Boys Don’t Cry.

Ces formidables musiciens et adorables sapiens sont les membres d’un groupe de Valentina dont j’ai beaucoup aimé le premier album (c’est l’un de ses groupes que je préfère) mais peut-être encore plus le suivant, à paraître l’année prochaine – c’est dans cette perspective qu’avait lieu hier cette séance de photos très amusante. C’était l’occasion rêvée, Sarah étant venue de New York spécialement pour que le groupe puisse jouer (ce soir) au Café Oto dans le cadre de la résidence (sold out) de Valentina.

J’ai pris plein de vidéos très réjouissantes, où l’on perçoit la véritable nature de mon amoureuse. Voici la vidéo rock lobsters :

Ce matin, Kate Bush découvrait avec stupeur l’étendue de la neige sur les toits d’Islington.

Pour la première fois, j’ai couru dans la neige de Londres.

Les foulques trouvaient le paysage particulièrement à leur goût.

Les renards ne pouvaient pas se faire discrets – je suis jalouse d’une photo que Susumu a prise hier soir, d’un renard immobile au milieu d’une chaussée enneigée, à la lueur des réverbères.

Moi, je n’ai vu que des bonhommes de neige (plein)…

Petit souvenir du formidable concert de Vanishing Twin au Rio Cinéma, samedi soir ; aussi incroyable que ça puisse paraître, c’était la première fois que je voyais sur scène ce groupe qui emmène si souvent ma chérie sur les routes des États-Unis. Voici Susumu, Valentina, Cathy et Arthur <3