JC+22

est le jour où j’envisage de me défenestrer.

Le vide du jour

Tout. Tout est vide. Je me sens seule dans une espèce qui, frappée par l’horreur, ne fait que développer des applis, des tutos, des réseaux de merde. Je n’en peux plus de lire des mails et des sms qui s’achèvent par « bises confinées ». On le sait, qu’on est confinés, c’est bon, lâchez-moi. J’étouffe dans l’espèce et je me sens seule à la fois, quel absurde inconfort.

(Vide avec détritus : sapin de Noël roux ( rose). Il n’est jamais trop tard.)

La musique du jour

Goodbye, chère amie, magnifique morceau du groupe cajun Magnolia Sisters, idéal pour dire adieu à mon lave-linge, qui nous a lâchés hier, en plein confinement. Et merci bien.

Ma chaîne hifi aussi a rendu l’âme, le même jour, c’est donc avec un casque sur les oreilles que j’écoute aujourd’hui

L’autre musique du jour

quant à elle très proche de ce que je ressens.

Et Le conseil lecture du jour, alors ?

Eh bien, reprenez toutes vos attestations de sortie depuis le début du confinement et relisez-les avec émotion, en vous rappelant ce que vous avez fait tel jour, à telle heure. (C’est également un exercice très stimulant pour la mémoire.)

Le gant du jour

Aujourd’hui, je me sens comme une vieille merde desséchée alors je choisis des photos de bitume. Ici, je trouve que les lignes composent un beau tableau abstrait, sur lequel ce gant presque habité, ouvert comme une main, m’évoque mon sentiment du jour, que l’on pourrait résumer par Au secours, un au secours sans le son, faute d’air, comme dans les cauchemars.

Le détritus du jour

Un élastique brillant pour que le monsieur confiné dans le bitume puisse jouer à la balle / au cerceau / au yoyo / au bilboquet.

La bonne nouvelle du jour

Les pâquerettes le font. Vivre confinées, à l’ombre des barreaux. Elles nous montrent l’exemple de la patience, nous enseignent le sens de l’absurde et nous rappellent notre condition d’animaux sociaux agglutinés dans le béton. Je vais mettre une banderole Merci les pâquerettes sur ma fenêtre côté rue, tiens.

Un lézard et moi regardons  passer avec nostalgie un des rares TER qui circulent encore et dans lequel lui comme moi, pour des raisons différentes, sommes persona non grata. Je découvre que son muret, tout comme la véloroute, est un spot de lézards.

Sur la véloroute aujourd’hui, le garçon qui me rappelait hier Duelling Banjos de Délivrance erre toujours avec son seau. Nous tâchons de deviner ce qu’il cherche. Comme hier, il a une bouteille vide à la main. Je suppute qu’il ramasse des bouteilles consignées mais il me détrompe : Vous ne voulez pas m’aider à attraper des lézards ? nous demande-t-il. Je suis horrifiée : Il ne faut pas attraper des bestioles, je lui dis. C’est pour mon serpent, ajoute-t-il. Je couine un Jesus désespéré en poursuivant mon chemin vers les lapins. Heureusement, il reste les lapins.

Avant de me coucher, je me bloque le dos. Journée de merde.

Mon relevé du jour

Lapin(s) : 19

Piéton(s) : 5

Joggeur(s) : 3

Contrôle(s) de police : 0

Douche : Oui