2 jours cellulaires

Mon amour et moi avons passé deux jours incognito à Paris.

Nous avons constaté l’extrême difficulté de s’y alimenter – à Londres, on trouve des options vegan absolument partout, des cuisines de tous les pays sont accessibles aux antispécistes, c’est fantastique (j’y ai même testé la nourriture népalaise) ; je me rappelle avoir constaté la même chose à Berlin il y a dix ans déjà ; mais à Paris, même trouver une option végétarienne est un défi. (Outre que les gens sont d’une impolitesse exemplaire, que les rats filent sur les trottoirs immondes et que des êtres humains errent pieds nus, égarés, au milieu de gravures de mode ployant sous les sacs de shopping.) Mais nous avons infusé notre magie dans cette ville qui m’est si hostile.

Nous avons trouvé l’hôtel le mieux insonorisé de la capitale, aux murs couverts de mousse alvéolaire. Il se trouve à la Villette, j’aime bien cet endroit (je ne suis pas que grognon).

Nous étions venues assister à la version concert de Cellular Songs, la pièce de Meredith Monk dont j’ai beaucoup parlé dans mon livre A happy woman mais également sur ce blog, dans la rubrique Autumn in New York. Après y avoir assisté, nous avons rejoint la joyeuse compagnie pour fêter l’anniversaire de ma chère Allison. Je les retrouvais, Meredith et elle, près de cinq ans ans après mon immersion dans la vie de l’Ensemble à New York. Allison et moi avons repris The Mountaineer’s Courtship, chanson d’Ernest et Hattie Stoneman (1927) que nous avions déjà chantée à Lille. Nous étions également en compagnie de Jean-Louis Tallon, auteur (entre autres) du formidable livre Meredith Monk, Une voix mystique, paru cette année aux éditions Le Mot et le Reste ; je le rencontrais hier pour la première fois après cinq ans d’une correspondance régulière et amicale. Ci-dessous, sur la photo prise par mon amour, on me voit auprès d’Allison et de Meredith et on aperçoit en bout de table Ellen Fisher, toujours aussi adorable et drôle qu’en 2017.

La photo ci-dessous a été prise par Jean-Louis.

Quand reverrai-je Allison et Meredith ? En octobre si je suis Valentina en tournée (c’est à l’étude), en 2023 si je fais miraculeusement partie des élus de la Villa Albertine… Cette fois, en tout cas, je ne laisserai pas passer tant d’années.

Et maintenant, l’Ensemble est en route pour une dernière date européenne cellulaire au Luxembourg, mon amour en plein vol pour Malmö, où elle jouera à minuit. Moi, je suis rentrée à Lens, un peu étourdie par tant d’émotions fortes.

(Détail du papier peint dans la chambre d’hôtel.)

/ 3 : des femmes qui tiennent la route

Je suis pour trois jours chez Aude Rabillon, que j’observe dans son quotidien de créatrice sonore et avec qui j’ai des discussions très riches (ce qui ne nous empêche pas, comme à la Factorie avec les poètes, de faire une boum le soir avec son fils de 7 ans). Hier, elle profitait de ce que le Musée des Arts était fermé pour choisir la salle où, le 3 mars, elle jouera en duo avec la violoncelliste Soizic Lebrat (qui figure également dans mon répertoire de créatrices sonores). Je les ai donc suivies dans le musée désert et, tandis qu’elles testaient l’acoustique des salles, j’en profitais pour entendre de très belles choses. Je me sentais très privilégiée…

Cette salle, parce qu’elle est dévolue à l’art contemporain, nous semblait plus appropriée que les salles plus classiques mais, la soufflerie n’émettant pas sur la même fréquence que leur duo, elle l’aurait ruiné.

Nous avons plaisanté sur le fait qu’il faudrait inverser les collections, la salle finalement retenue étant très classique mais aussi et surtout très masculine, et Claire a dit « Quand même, il y a des femmes qui tiennent la route – regardez, Vénus… » Ce qui a naturellement achevé de nous convaincre.