Re-forge

Et un petit souvenir de ma dernière lecture à La Forge (place du Général de Gaulle, à Marcq-en-Barœul) avec le violoncelliste Guillaume Lafeuille. Merci à Nico pour la photo !

La poésie encore

J’a-dore le marché de la poésie, quand j’y retrouve Mandana, mes Montpelliéraines de choc, Sarah, IBL (que je ne présente plus) et NatYot, et les autres ami-e-s.

(Ici, avec IBL et Sarah <3)

Qu’est-ce que c’est ?

Non, ce n’est pas un film américain post-apocalyptique, c’est Montigny-en-Gohelle. Ci-dessus, en vue immersive sur le service de cartographie en ligne, ci-dessous non. Et c’est, rien que pour vous, 17 images du bonheur dans le bassin minier (la précédente ne compte pas, elle n’est pas de moi mais d’un Tobe Hooper minier).

Toujours à Montigny, face à la station-service et aux supermarchés incendiés, éventrés, noyés sous les déchets, ces Rideaux et Voilages remarquables sans esbroufe ni dauphins.

Depuis le 23 mai, je poursuis mon projet poétique en forme de road-trip cycliste. Je descends chaque fois à une gare différente avec mon vélo, je me perds et je découvre. 40 km par jour sur un biclou en fin de carrière, sous le soleil qui fait cloquer l’hélix de mon oreille droite. Je pédale dans un autre espace-temps. Si par exemple vous déplorez la mort des petits commerces et des centres-villes, c’est parce que vous n’allez pas à Billy-Montigny, où les années 1980 n’ont pas pris fin. Ameublement et décoration,

chaussures et prêt-à-porter, il y a tout ce que vous voulez.

Moins à Fouquières-lès-Lens.

Encore que. Si j’avais su écouter le trottoir, j’aurais enfilé ces protège-oreilles, bien qu’il fît 35 degrés ce jour-là, et des cloques ne darderaient pas sur mon hélix. Je n’ai pas voulu croire que c’était ce dont j’avais besoin.

Dans le bassin minier, on ne trouve pas que les années 1980 ; il y a aussi la modernité – c’est à Meurchin.

Ainsi le cycle de la vie suit-il son cours. Ci dessous, des bébés cygnes de Wingles.

Comme moi, la nature est heureuse ici. J’en veux pour preuve ce champ de colza et de coquelicots à Annay (≠ en Annay).

Gloire à Annay (≠ d’Annay) !

Les surprises jaillissent à chaque tour de roue. Un exemple : après le jardin des voitures brûlées à Hénin-Beaumont,

au fond de ce qui est une impasse pour les véhicules motorisés, il suffit de traverser la voie ferrée

pour déboucher dans le parc des Îles, et là laissez-moi vous dire que le roi n’est pas notre cousin. De quoi danser de joie devant les escaliers. Yee-haw !

Un autre jour (passé comme les couleurs de cette affiche livrée aux intempéries à Noyelles-sous-Lens), on pouvait se rendre au salon du bien-être et de / par (?) la voyance. Mais à quoi bon la voyance quand le bien-être est juste là et ne demande qu’à être vu, saisi au vol par l’œil disponible, alerte, brillant de gratitude ?

Et personne n’est laissé de côté, comme on le voit dans ce parc des mêmes Noyelles (est-ce un Noyelle ou une Noyelle ?) au bord de l’autoroute dite rocade minière.

Tout cela est tellement excitant que l’on peut dire, waouh,

Mais l’endroit que je préfère et où je tiens ma permanence poétique, c’est ce parc de Sallaumines. Je m’y sens comme chez moi, quelque part entre la déchetterie, un lotissement et l’autoroute. Il ne s’y passe jamais rien = Il s’y passe toujours quelque chose. Dimanche, une pie a poursuivi un chat en le narguant, je le jure.

Les Parleuses : le podcast

Samedi dernier, j’ai eu l’honneur de répondre à l’invitation de Littérature etc. (encore un immense merci à Aurélie Olivier pour sa confiance) et de devenir une parleuse. Vous trouverez le podcast, le texte et quelques images sur la page Les Parleuses #3 : Carson McCullers, accessible depuis le menu supérieur de ce blog ou en cliquant sur ce lien.

(Merci à mon antique pour la photo souvenir.)

Vous pouvez également lire mon texte ici-même.

5 arrière-mondes (1) : au sud-est de la métropole lilloise

Les arrière-mondes que je vous présente ici se situent dans un périmètre de moins de cinq kilomètres-carrés. Ils ne communiquent pas ensemble et diffèrent tant, dans l’esprit, que quand on en traverse un, on se sent très loin des autres. Je les ordonne dans un sens de lecture classique, de haut en bas et de gauche à droite, autrement dit vers le sud-est. J’aurais aussi pu les classer dans l’ordre du plus accueillant au plus inquiétant, auquel cas le dernier resterait le dernier.

1. Suivez-moi. Passez les grilles et les blocs de béton qui voudraient obstruer le tunnel. Entrez dans le tunnel. N’ayez pas peur. De quoi s’agit-il ? D’une autoroute à l’abandon ? D’une voie ferrée ?

Cent mètres plus loin, voici le paysage que vous découvrez. Les éléments présents à l’image ne vous permettent pas de répondre à la question précédente, j’en ai conscience.

Sous cet angle-là non plus, je suppose.

Tant mieux : je n’aimerais pas provoquer un afflux de touristes dans ce lieu relativement préservé, à quelques décharges près.

Car il mène à des paysages inattendus : à presque la campagne – au loin, vous reconnaîtrez deux des tours Europe dont j’ai déjà dit, ici-même, combien elles me fascinent.

Vous longez le champ et, à votre gauche, se déploie un site ferroviaire désaffecté qui, quoique sous vidéo-surveillance, vous épargne les chiens, la police et autres milices. Du moins y ai-je échappé à chacune de mes visites.

Je n’ai pas récupéré d’isolateurs de caténaires pour décorer mon salon parce que c’est trop lourd pour la capuche de mon K-way, mais il y a l’embarras du choix : verre, céramique, petit modèle ou grand modèle.

Idem pour les nombres premiers : difficiles à transporter – puisque cloués dans des traverses.

Puis, sans barrière ni transition, vous parvenez à un dépôt ferroviaire qui n’est pas du tout désaffecté.

Fin de l’arrière-monde 1.

2. De part et d’autre de l’autoroute A27, deux arrières-mondes apportent un éventail d’étrangetés intéressant (quoique pas inépuisable). Il s’agit de zones infréquentées, sinon par des centaines de lapins et de lièvres.

Ma passion pour les plans de villes m’a longtemps tenue à distance des vues satellite mais j’ai appris à les apprécier depuis que je me suis prise de passion pour les arrière-mondes : elles permettent une vue d’ensemble sur des espaces dont on ne pourrait se représenter l’agencement à la seule force des jambes et de l’intuition qu’elles nous en donnent, en particulier des espaces qui ne sont pas tout à fait urbains (bois, carrières, etc.), voire qui ne sont pas tout à fait accessibles.

a. au nord de l’A27

Pour commencer, voici un arrière-monde interstitiel entre trois terrains de jeu réservés à la bourgeoisie : un centre hippique, un terrain de golf et un complexe motocycliste. L’on peut y pénétrer à divers points ; en sortir est plus compliqué. Certaines parties sont ouvertes sur l’avant-monde, comme on le voit ci-dessous.

Certains aménagements peuvent faire croire, fallacieusement, que l’on s’apprête à entrer dans un espace balisé.

Mais non. Là-haut, les sentiers sont extrêmement étroits, certains totalement obstrués par la végétation et notamment par les orties. Les lapins y bondissent de toutes parts.

Depuis ce promontoire, qui avance dans la verdure à la manière d’une digue, l’on peut apercevoir, d’un côté, le terrain de golf,

et de l’autre le complexe motocycliste dont vous avez pu voir le tracé sinueux sur le plan.

b. au sud de l’A27

Il y a bien des manières d’atteindre cet arrière-monde à presque la campagne. L’une de mes préférées consiste en un chemin étroit serti entre l’autoroute A1 et un champ ; un arbre déraciné cet hiver par une tempête est sa dernière cicatrice en date, elle oblige à faire un petit saut de cabri bien agréable entre deux foulées ; sur le talus qui descend vers le champ, de la monnaie du pape en abondance.

On n’est pas censé passer devant cette grille (qui mène selon toute vraisemblance à l’autoroute) ; il fallait tourner à droite plus tôt. Demi-tour, hop.

Un peu plus loin, on traverse ce passage à niveau agreste, autour duquel je prépare depuis le mois de septembre 2018 un petit travail photo que je vous livrerai en septembre 2019.

Vous n’y verrez pas ceci parce que ce n’est pas dans le bon sens.

Ici, comme ailleurs, les délinquant-e-s aiment démonter des voitures. Ça se passe sans doute la nuit, quand je ne cours pas là.

Dans le champ il y a deux bunkers

et dans les bunkers il y a du champêtre – un doux mélange d’orties et de barres de fer rouillé.

Tout au fond du champ, une série de buttes à lapins masque partiellement une voie de TGV.

On peut y accéder si on n’a rien de prévu ces prochaines années.

Ou on peut monter sur la butte, si on n’a pas peur de se faire broyer le pied par un piège destiné aux lapins, car cet arrière-monde n’est pas un paradis, l’on y trouve des chasseurs et des pièges posés par eux. J’en ai vu un cet hiver, un grand crétin qui visait l’entrée d’un terrier, prêt à faire exploser une tête de lapin pour son loisir. Il a baissé son fusil pour me laisser passer mais je ne l’ai pas regardé pour éviter de lui vomir dessus ou de retourner son arme contre lui. Si l’on accepte de prendre les mêmes risques que les lapins, on peut surplomber les champs et la voie de TGV.

On monte par là, comme ça

et après on peut regarder en bas, c’est chouette.

Sans ces raclures de chasseurs, le paradis des lapins et des lièvres ressemblerait un peu à ça (on s’y amuse comme des fous, ces temps-ci).

3. Pas très loin d’un ancien centre de tri postal et de son arrêt ferroviaire désaffecté,

un caddie brûlé nous invite à pénétrer dans un lieu bien protégé des intrusion par des blocs de béton et bittes chromées

On accède à ça. Ce n’est pas spectaculaire, de prime abord, je vous l’accorde

mais à y regarder de plus près c’est carrément un lieu d’art contemporain

et de multiples vernissages – vous trouverez ci-dessous des résidus de fêtes mais aussi de mon ancienne rubrique consacrée aux sols.

4. Nous sommes dans la même ville, à peine un kilomètre au sud-est de l’arrière-monde n°2b ci-dessus. Nous l’atteignons après avoir traversé un parc d’activité différent de celui que nous présentions à l’instant – bien plus étendu. Nous en apercevons un bâtiment de tôle, en arrière-plan de ce petit chemin qui ne sent pas la noisette.

Ai-je déjà mentionné le fait que l’arrière-monde n’était pas seulement le théâtre de fêtes écologiquement inoubliables mais aussi un espace de décharge très apprécié ? Quoique bien plus difficile d’accès que les déchetteries, on s’aperçoit qu’il est convoité par un certain nombre d’entrepreneurs de BTP, de garagistes et de familles désunies (nous y reviendrons dans des numéros spéciaux de la rubrique L’arrière-monde).

Cette fois nous passons sous le TGV (le même) : ça change.

Des peintures rupestres nous avertissent de ce qui nous attend de l’autre côté du portique.

C’est, avant tout, une puanteur rare, non pas celle du fumier mais celle du liquide noir de nature indéfinissable qui constitue les flaques ci-dessous.

Quand on a traversé les champs glauques de cet arrière-monde, l’on débouche sur un pont qui surplombe l’autoroute. Les arrière-mondes ont toujours quelque chose à voir avec les autoroutes et les voies de chemin de fer, particulièrement de TGV.

Normal, me direz-vous, c’est le principe même des espaces interstitiels. Et puisqu’on en parle, quelques éléments visuels indissociables de ces derniers :

Quelques arrière-mondes (2) : au nord de la métropole lilloise

Parfois, une rue joue au bout du monde toute seule. C’est le cas de cette rue infréquentée, absolument dépourvue d’habitations et très peu pourvue en activités, si l’on exclut la cimenterie représentée par la boucle sur le plan ci-dessous. Elle a cependant des fonctions : elle sépare le canal d’une friche où même les voies ferrées s’interrompent, et l’on y trouve l’une des frontières entre deux villes. C’est un arrière-monde qui divise sans en avoir l’air.

Un long mur de béton borde la rue, à l’ouest, côté friche. Il attire étrangement peu de street artists. Certains pans sont particulièrement dégradés.

Trace d’une activité artistique ancienne dans la rue, ce visage au pochoir presque effacé.

L’impasse que l’on devine sur le plan ressemble à ceci. C’est plus que décevant, carrément injuste : encore une friche dont personne n’a que faire mais dont l’accès nous est interdit, à nous que les arrière-mondes comblent de joie.

Incongrue, à l’entrée de la cimenterie, cette locomotive abandonnée sur un bloc de pierre. Si j’avais disposé d’une capuche, j’aurais été tentée de l’emporter ; mais alors j’aurais eu l’impression de diminuer un peu ce territoire secret.

Maintenant, intéressons-nous à l’est de la rue : de l’autre côté du canal, contrairement aux apparences, cette usine n’est pas désaffectée (comme l’est en revanche la plus illustre et impressionnante de ses voisines, ancienne minoterie située à 300 mètres d’ici, à vol d’oiseau, et dont je ne mentionnerai pas le nom, pour stimuler votre curiosité).

Il est extrêmement facile de s’approcher du canal, les grilles qui en condamnent l’accès étant du genre symbolique. Cela dit, ce n’est pas comme s’il y avait des millions de choses passionnantes à voir, de l’autre côté.

Il y a quand même des Schtroumpfs et des puzzles. Il fallait y penser. Je veux dire, à venir les déposer ici.

Il y a aussi des trucs brisés, bien sûr, il y en a toujours.

Rappels

J’ai piqué deux images sur la page de Littérature, etc. pour vous rappeler notre rendez-vous de demain, à 16h chez Violette (place Vanhoenacker, Lille).

Mais avant cela, nous nous verrons ce soir à la Forge (place du Général de Gaulle, Marcq-en-Barœul), à 19h. Vous n’avez pas oublié, j’espère ? Ce serait dommage parce que Guillaume Lafeuille jouera du Britten et du Ligeti au violoncelle ; quant à moi, je lirai quelques extraits de mon livre sur Meredith Monk, A happy woman.

Amies de la poésie

Vous nous avez ratées à Montpellier ? Ne nous manquez pas à Paris, au Marché de la Poésie de Saint-Sulpice, le deuxième week-end de juin. Vous pourrez y découvrir le nouveau livre d’Isabelle Bonat-Luciani, Des Rendez-vous, et vous y procurer Le nord du monde de Nathalie Yot, si vous n’avez pas encore lu, ou (si vous l’avez déjà lu) pour l’offrir à vos nombreux amis, ou (si c’est déjà fait) découvrir la poésie de NatYot et son super groupe Natyotcassan (vous pouvez l’écouter ici). IBL et moi serons sur le stand des Carnets du Dessert de Lune le samedi 8 juin de 15h30 à 16h30.

Je suis ici en compagnie d’IBL et NatYot, à la Comédie du Livre.

Un pot de bienvenue

Cher-e-s ami-e-s de Clémentine,
chers admiratrices et admirateurs de Clemix,

Votre am-i-dole m’annonce votre afflux imminent sur ce modeste blog et je me réjouis de vous accueillir, même si je suis en travaux ces temps-ci. Désolée pour le désordre. Faute de pouvoir vous tendre une coupe de mousseux et une assiette de Monaco (marque déposée), je vais vous offrir aujourd’hui un petit bonus au clip de Motherfucker. Êtes-vous prêt-e-s pour le grand frisson ? Le lieu que j’ai dégoté pour le tournage n’est pas que superficiellement flippant, il l’est en profondeur, comme une vue satellite le révèle. Aujourd’hui, rien que pour vous, les péniches englouties de Cashmetal Sequedin et de Produits Chimiques de Loos (oui, vous avez bien lu : bonne baignade !)

Si vous voulez zoomer à votre aise, la localisation exacte est 50°37’31.5″N 3°00’34.1″E. Je pensais que mon imagination me jouait des tours mais après consultation de Clémentine et d’Allison, je peux aujourd’hui l’affirmer, on nous cache des choses, et pas des petites. Pas des miettes qu’on glisse sous des tapis. Avouez : vous frémirez encore plus, désormais, quand vous visionnerez la vidéo de Motherfucker.

Ne me remerciez pas, c’est moi qui vous remercie de votre visite. Revenez quand vous voulez – j’ai aussi une image d’abduction extraterrestre en vue immersive dans un champ à Vendin-le-Vieil, je vous la montrerai à l’occasion.

1er mai

Petit souvenir d’une rencontre matinale avec Canan Marasligil et Auré de l’association Mine de Culture, au salon du livre d’expression populaire et de critique sociale, hier, à Arras. Canan et moi poursuivions une discussion ébauchée le 6 avril à Libercourt lors du Melting Potch, discussion qui pourrait bien se poursuivre encore puisque, hors micro, nous avons commencé à questionner la notion même de territoire, et la manière dont les mots fractionnent et cloisonnent à l’extrême notre expérience en même temps qu’ils opèrent un lissage de la société – un paradoxe qui m’occupe beaucoup depuis plusieurs mois et que souhaite aussi questionner Mine de Culture. J’espère donc pouvoir dire, à suivre…