Le cartilage au sec

Bon, Brooklyn c’est très très vaste (quatre fois Manhattan, a priori) ; je suis allée un peu vite quand j’en ai esquissé une image idyllique dans certains billets précédents. Aujourd’hui je déprimais alors mes proches m’ont dit d’aller me promener. J’ai donc marché deux heures et demie et me suis évidemment perdue (vous savez comment je suis : je contourne les incontournables, boude les bâtiments mythiques et les musées, je marche au hasard et je regarde comment et dans quoi vivent les autres – ça, ça me passionne). Donc cet après-midi j’ai traversé Bushwick, Ridgewood et Glendale ; ça changeait de Bed Stuy, Crown Heights et Prospect Lefferts Gardens, où j’avais déjà couru. J’ai parfois eu l’impression d’avoir atteint le bout du monde, celui où vont se cacher tous ceux qui n’ont pas intérêt à ce qu’on les retrouve. Je n’ai pas osé prendre beaucoup de photos, j’ai les os et le cartilage délicats, mais voici trois bribes d’ambiance, c’est déjà bien et mes dents se réjouissent d’être toutes rentrées avec moi.

Mal assis à Brooklyn ?

C’est assez difficile à imaginer, de prime abord, quand on voit toutes ces installations aussi ingénieuses qu’apparemment confortables dans les petites cours, derrière les grilles de fer forgé ; même les escaliers sont agréables, ceux qui mènent aux perrons mais aussi ceux de secours, que je pratique avec autant de plaisir que les autochtones. Mais j’ai trouvé, cet après-midi, une configuration digne d’un bon vieux Mal assis, là : à l’angle de Fulton St et de Stuyvesant Ave.

Light and fast

Aujourd’hui, je me suis perdue en courant dans les rues de Brooklyn ; hélas, j’avais oublié mon appareil photo (une première) et je ne peux donc vous faire partager aucune de mes découvertes. Ensuite, j’ai écrit sept pages Word et un certain nombre dans mon carnet. Cette affaire se présente bien. Puis, grâce à Skype, j’ai participé (en léger décalage horaire) à mon traditionnel apéro du dimanche soir avec mes amies. Ce soir (ce qui était vraiment le soir pour moi), j’ai assisté à une répétition dans le loft de Meredith Monk. L’effectif change selon les répétitions et cette fois j’ai savouré mes frissons en écoutant Meredith et l’excellente Allison Sniffin (sa collaboratrice de longue date – 1996 pour être exacte – et par ailleurs un personnage assez fascinant) accompagnées (à moins que ce ne soit l’inverse) par un quatuor à cordes issu de l’ensemble contemporain ACME. Ils reprenaient Ascent, le sublime final de Songs of ascension, sans doute l’un des morceaux les plus accessibles de Meredith Monk pour le profane. Encore une fois, il fut question d’occuper l’espace.

Vous ne connaissez pas Ascent ? En voici un extrait, dans une autre configuration – c’est à la toute fin du montage, à 7’37, mais je ne peux que vous encourager à tout regarder, c’est magnifique.

Home

le samedi soir à Brooklyn
la lumière dorée ruisselle dans les escaliers rouillés
les voix chantent les habitants s’assoient sur leur porche
avec un verre et une cigarette
je regarde un couple en deux fois et l’homme
me dit Hi doucement, sans point d’exclamation

Premier jour avec Meredith Monk

Je n’ose pas poster les photos où l’on voit particulièrement bien Meredith Monk : elle m’a autorisée à prendre des photos, mais je n’ai pas parlé de mon blog – bon, j’ai tout de même été félicitée pour ma discrétion, qui m’a valu de siéger à la droite de la grande dame tout au long de cette journée de répétitions avec le Young People’s Chorus de New York. Je ne vais pas tout vous raconter, je vais maintenant écrire ce que j’ai vu et vécu, je suis là pour ça – dix pages de notes dans mon carnet en six heures – et je tâcherai de faire ainsi chaque jour. Demain soir, répétition dans le loft mythique de M.M. Quelques vagues images tout de même, en attendant un vrai aval de la principale concernée.

(Katie Geissinger, Francisco J. Nuňez, Meredith Monk et quelques membres du Young People’s Chorus, quasi de dos.)

(Les plus jeunes gens du YPC – le benjamin, Caleb, a huit ans -, répétant avant l’arrivée de Meredith Monk.)

(Meredith Monk joue de la guimbarde tandis que les jeunes occupent l’espace – vaste projet – ; de part et d’autre, deux des solistes de Dancing voices, Carter et Tenzin.)

House Foundation

Peter appelle ses bureaux « The cave » ; l’on y trouve une documentation audio, vidéo et picturale incroyable sur Meredith Monk. En voici trois images, dont, au milieu, la première photo qui me montre en présence de Meredith Monk, si on veut – je la rencontre en vrai demain, j’assiste à ses répétitions de 10 à 16 h. J’ai oublié que je ne parlais pas très bien anglais et c’était fluide et je ne cherchais pas mes mots (ni à avoir un accent décent, notez bien) ; Peter est un homme charmant et drôle. J’ai aussi rapporté de la House Foundation des documents qui me seront très utiles. Désormais, je dispose du calendrier de Lucien, David, Pauline et de Meredith Monk. Je fais collection : stars de Lille et de New York, envoyez-moi le vôtre, par pigeon s’il vous plaît.

Le Brooklyn Bridge pour tous

J’avais trois heures à tuer avant mon premier rendez-vous avec Peter Sciscioli, le directeur artistique de Meredith Monk, alors j’ai décidé d’aller à son bureau à pied, en traversant le Brooklyn Bridge, mais il se trouve que quelques millions de touristes, particulièrement asiatiques, avaient eu la même idée que moi. Ce fut mon premier bain de foule new-yorkais. Le Manhattan Bridge a l’air formidable aussi (voir la septième image ci-dessous : c’est lui, vu depuis son rival).

Bedford Stuyvesant

Hier je suis arrivée dans mon appartement de Brooklyn vers 4h du matin, heure française ; je me suis levée à 6h, heure locale et j’ai fait mon premier footing à Brooklyn. Mon quartier, c’est Bedford Stuyvesant, dont voici trois vues – les deux dernières, c’est ma maison, je suis au premier étage.

Brooklyn, pour ce que j’en ai vu ce matin, c’est des centaines d’églises et de centres religieux, plusieurs par rue, parfois des avenues entières (Utica, par exemple).

Et puis je dois quand même vous signaler, quitte à vous décevoir, que l’on trouve au moins autant de lions, aigles et zéphyrs embrasés de barrière à Brooklyn que dans la métropole lilloise. Kitsch et lutte des classes, une vérité universelle ?