Le Sel de tes yeux

Le Sel de tes yeux

 Quatrième de couverture :

« Sarah aime les filles. Dans cette petite ville du bassin minier du nord de la France, l’homosexualité n’est pas bien vue. Lorsque sa mère découvre, planqué sous le matelas de l’adolescente, un roman ayant pour sujet une relation amoureuse entre deux filles, elle entre dans une rage folle.

Mais que se passera-t-il lorsque Sarah, au cours d’une soirée, se retrouvera face à l’autrice du roman ?

Le Sel de tes yeux est l’histoire de cette rencontre en partie imaginaire entre une écrivaine et son personnage.

En partie seulement. Car Sarah existe vraiment. Fanny Chiarello l’a croisée un jour, alors que la lycéenne passait en courant. Elle l’a photographiée, sans pouvoir lui parler. Alors elle a écrit ce livre dans lequel elle s’adresse à la jeune fille en lui prêtant une famille, des amis, une amoureuse. Une « lettre à une inconnue », brûlante comme le sel des larmes que l’on n’a pas versées.

Fanny Chiarello a publié cinq romans et un livre sur Meredith Monk aux Éditions de l’Olivier. Elle vit à Lens. »

Si Le sel était une chanson, ce pourrait être celle-ci :

Si vous suivez ce blog depuis un moment (disons au moins depuis le début août 2018), Sarah vous sera familière. C’est l’avatar romanesque de celle que j’appelle ici la jeune athlète.  Tout a commencé par la préparation de mon exposition Ligne 18.

Pour résumer, l’association Colères du Présent (Arras) m’a commandé une exposition de photos et de textes sur le bassin minier des Hauts-de-France. J’ai décidé que le thème serait la langueur de l’été, et le territoire l’agglomération Lens-Liévin, dont je suis originaire. Dès le deuxième jour de mes déambulations cyclistes avec mon appareil photo et mon carnet (le 1er août 2018), j’ai croisé dans un parc de Sallaumines une jeune fille qui courait. Elle m’a souri et il n’en fallait pas plus pour que naisse la fiction.

(La jeune athlète le 8 août 2018.)

Pendant plus de sept mois, j’ai écrit une Lettre à une jeune athlète dans laquelle, à travers un parallèle entre mon adolescence et ce que j’imaginais de la sienne, j’abordais de nombreux thèmes : la création, l’urbanisme, l’âge, l’époque, la différence, etc. et, bien sûr, l’homosexualité.

(Le quartier de Sarah.)

Le printemps dernier, le quotidien L’Humanité a publié trois pages (dans trois numéros successifs) reprenant des textes et des images de Ligne 18. Le 25 avril, comme je l’annonçais ici, il y a donc eu dans L’Huma une photo de la jeune athlète. J’en ai acheté un exemplaire pour elle et un pour moi. J’ai envisagé de glisser le sien dans la boîte aux lettres familiale (le 24 octobre précédent, j’avais appris son nom et son adresse au terme d’une véritable enquête) et imaginé que sa mère le subtilisait. Le jour même, j’ai commencé à tirer ce mince fil narratif, dans une urgence telle que je n’en avais pas ressenti depuis longtemps.

Quelques semaines plus tard, j’avais écrit le premier jet du Sel de tes yeux . Le roman reprend deux ou trois textes de Ligne 18 et un certain nombre d’éléments présents dans la Lettre à une jeune athlète, intégrés au texte sous forme de détails ou de brèves digressions sur des sujets évoqués plus haut, et parfois aussi de manière diffuse, indécelable.

(Photo de moi prise par l’une de mes amies le jour où je crois reconnaître la jeune athlète à l’orée du parc – dans le roman, c’est le passage où je rencontre Mona et son petit ami Enzo.)

Vous l’aurez deviné, ce roman est un mélange inextricable de fiction et de réalité – la mention « Elle vit à Lens » en quatrième de couverture le prouve assez : mon histoire avec le Sel, qui débute le 1er août 2018 et devient un livre avec ISBN le 2 janvier 2020, a bouleversé ma vie au point que je suis revenue vivre dans le bassin minier de ma jeunesse, après 27 années riches en aventures dans la métropole lilloise.

(Dessins à la craie sur le sol du stade Léo Lagrange, à Lens, le 24 octobre 2018, lors de mon enquête sur la jeune athlète : Reviens dans le réel, semblent-il me dire – ma tendance à l’apophénie au cours de cette histoire pourrait faire l’objet d’un roman à part entière.)

Le sel de tes yeux, c’est un tu (Sarah) et un je (moi) qui alternent.

C’est mon roman le plus tendre et le plus intimiste à ce jour.

(Tag dans le parc Gagarine – ainsi que je l’ai renommé – où court Sarah.)

C’est une manière d’encourager toutes les jeunes athlètes qui se sentent viscéralement étrangères aux schémas de société dominants (donc seules, différentes et décalées) à tenir bon : un jour, tout ira bien. Un jour, il y aura l’amour, la lumière. En attendant, et au-delà, il y a la création, qui vous peuple le monde le plus désespérant.

C’est un ami que je leur envoie depuis l’époque désormais lointaine où j’avais leur âge et faisais l’expérience de leur souffrance.

C’est une playlist assez différente de celles que constituent mes précédentes parutions. Outre Tirzah, l’on y trouve

(Le groupe éphémère de Branford Marsalis, Buckshot Lefonque, avec la voix de Maya Angelou herself lisant son poème I Know Why the Caged Bird Sings.)

Un personnage, Sayaka, rend hommage à Sayaka Himeno, l’extraordinaire batteuse du génial trio féminin japonais de rock expérimental Nisennenmondai, mais on ne l’entend pas dans le roman ; je me fais seulement plaisir, là.

En revanche, on y entend aussi

On y croise aussi (pour ne pas changer) Ravel, Debussy et Caplet. Et aussi Alice Coltrane et Nicole Mitchell. Et même de la flûte Paetzold – c’est ça :

Eh oui…

Pourquoi ce titre paradoxalement sucré, Le sel de tes yeux ? D’abord parce que l’expression se trouve dans le roman, dans un contexte lacrymal, mais aussi parce que Sarah découvre le pouvoir libérateur de la pratique artistique et le regard neuf que celle-ci lui donne sur le quotidien, un regard propre à enchanter l’ordinaire – un regard qui détiendrait le sel de la vie. Alors qu’elle s’ouvre à ce que lui dit le monde, elle aperçoit sur un mur de Lens un dessin d’œil. Si je n’ai pas encore vu dans ma nouvelle ville d’adoption ce type d’œil isolé, j’en connais déjà un sur la véloroute du bassin minier, entre Méricourt et Avion :

J’en ai surtout croisé un certain nombre dans la métropole lilloise. En voici une toute petite sélection.

   

Bref,