Ce matin, pour la première fois en six mois, je suis allée courir sur l’un de mes terrils préférés. La chasse étant fermée depuis trois jours (officiellement puisque dans ce pays, diverses dérogations permettent aux psychopathes d’assouvir leurs pulsions en toute saison), je me réjouissais de retrouver ce site qui a été le décor de moments parmi les plus beaux de ma vie. Nous appelions alors « la Quatrième Dimension » ce terril mystérieux et labyrinthique où l’on perdait la notion des points cardinaux mais aussi du bas et du haut. En voici quelques images datant de 2020 :
Les lieux que l’on voit sur ces photos sont désormais inaccessibles. Condamnés par barbelés, barrières, panneaux. Sa sauvagerie autrefois inquiétante et fascinante a laissé place à une signalétique quasi carcérale + infographie criarde, comme c’est arrivé à plusieurs autres terrils avant lui. Les trois quarts des chemins qui avaient gardé la trace de mon bonheur me sont désormais interdits. Je me demande ce que ressentent celles et ceux qui pratiquaient ces lieux depuis plus longtemps que moi, certain-e-s depuis toujours : quelle perte ces aménagements représentent pour eux. Le problème de ce monde, c’est qu’il est dessiné, balisé, cloisonné par des bureaucrates qui n’en sont pas les usager-e-s.
Ci-dessous, on aperçoit encore des sentiers que nous aimions emprunter, notamment pour aller cueillir des mûres.
On trouve aussi désormais sur ce terril d’immenses zones de quiétude pour la faune et la flore, ce qui serait formidable si la chasse était interdite et si on n’abattait pas des arbres par dizaines pour installer des belvédères et autres infrastructures conçues pour les touristes alors qu’il n’y a PAS de touristes ici, Unesco ou pas, Starbucks ou pas, il n’y en aura jamais. Laissons les arbres tranquilles, et tous les êtres dont ils sont l’habitat.