Regnéville, acte 2, jour 11

Ce matin, réveillée dès 5h, je me suis lancée dans la nuit plus tôt encore que les jours précédents et j’ai découvert avec ravissement que je pouvais de nouveau courir sur un chemin de campagne dépourvu d’éclairage public sans paniquer, voire m’arrêter pour envoyer une photo à ma chérie sans vérifier constamment autour de moi qu’un suidé n’était pas en train de foncer vers moi sur la pointe des sabots pour me rompre les tibias. Comme chaque matin, je suis passée devant un certain nombre d’amis et, si ce cheval dormait encore, son compagnon a fait son Danny à mon approche et couru vers moi en dansant, puis on a fait les câlins de nez. Je suis sûre qu’il me reconnaît et qu’il m’aime bien parce que je ne passe jamais par là sans lui demander de ses nouvelles (il a une blessure près de l’œil) et lui flatter les naseaux.

Quand j’ai descendu la route vers la plage de Montmartin, la lune presque pleine (elle le sera totalement demain) se reflétait sur la mer. J’ai regretté de ne pas avoir un bon appareil photo.

La marée haute, la lune qui s’estompe tout doucement, rosée par le soleil levant, une mouette passe par là.

J’ai contourné la dune qui mène au havre jusqu’à cette petite crique où Félicia m’apprendrait peu après que trois phoques ont élu domicile. Hélas, ils n’y étaient pas ce matin, j’y retournerai donc cet après-midi.

Vous imaginez le bonheur ? Là, trois phoques étendus sur la plage…

Montmartin vu depuis la dune.

Après un thé, un échange de livres et une promenade dans les Fours à Chaux, un selfie peu avantageux et à contrejour avec Félicia, qui n’est pas seulement une compositrice géniale mais une personne très sympathique. C’est amusant d’apprendre comment des artistes qu’on aime appréhendent leur propre création, son contexte et ce qui la nourrit. Nous avons notamment parlé des musiques auxquelles nous n’accrochions pas avant qu’un déclic ne se produise ; j’ai dit que j’avais vécu ça récemment avec Big Thief et il se trouve que Félicia avait écouté Adrianne Lenker ce matin – ces coïncidences, à la longue, on oublierait presque de s’en étonner… Maintenant, je vais me plonger dans A Forest Petrifies, premier volume de son roman – j’avoue ne pas encore connaître son écriture, encore que j’en aie forcément un aperçu à travers sa musique.