Regnéville, acte 2, jour 10

Ce matin, il m’a retrouvée : le lièvre d’hier. Je venais de là

et lui était sur la plage ; au début, quand je l’ai vu courir vers moi, pour les mêmes raisons qu’hier je l’ai pris pour quelqu’un d’autre – non pas, cette fois, pour un marcassin mais pour une poule d’eau, oui, une poule d’eau de mer (peu après, j’en ai tellement ri que j’ai failli rouler dans le sable).

La photo est floue mais au moins vous ne direz plus que je suis mytho ou que sais-je. Marée haute ce matin, donc, et pas de lever de soleil – pas de soleil aujourd’hui. Il n’est pas venu. Les coqs n’ont pas chanté. Les piverts, en revanche, font une scie musicale au long des allées arborées. Mais ici, on n’entend que le fracas des vagues, quelques mouettes et les moutons derrière la dune.

Demain, à la même heure, je recevrai Félicia Atkinson aux Fours à Chaux pour un café (je vous ai déjà, bien des fois, fait écouter sa musique) ;

après-demain, à la même heure, je serai dans le premier train sur trois pour Lille et

dans trois jours, à la même heure, je serai là-dessous

je ferai des claquettes dans l’Eurostar, à quelques minutes des bras de mon amoureuse. Tout serait vraiment parfait si seulement des chevreuils couraient avec moi dans ces prairies ou

surgissaient d’une des nombreuses ruines qui ponctuent le paysage d’ici, comme sur les photos que m’a envoyées Claire ce week-end. J’y crois chaque matin ; ça viendra. Je pense que je suis prête aussi pour les sangliers. Oui, ça y est, je sais que la prochaine fois, ça se passera bien. Et Mathilde (une amie de Marianne, également sculptrice, qui se joint souvent à nous) m’a donné un truc a priori imparable pour éviter une charge : le pas de côté. Et le pas de côté, ça me connaît.